Olivier Bello
Modéliste d'arsenal


Des chiffres surprenants

Ce bâtiment jauge 280 tonneaux, pour une longueur de 100 pieds entre les verticales d'étrave et d'étambot, une largeur de 26 pieds au maître-bau et un creux de 7 pieds et 10 pouces.

La voilure de ce navire de trois mâts est constituée de 9 voiles principales (8 carrées plus celle d'artimon), 3 focs et 6 voiles d'étai, sans parler des 8 bonnettes. L'arcasse présente 3 barres d'écusson et la traditionnelle barre de pont. Le bas-mât principal est en une seule pièce car son diamètre n'est que de 22 palmes (en France, une palme vaut 13 lignes). Les câbles d'ancre ont un diamètre maximum de 13 pouces et la caisse des poulies les plus grandes a une longueur de 12 pouces.

La chaloupe a 25 pieds de long alors que le canot n'en a que 16,5. Les ancres sont au nombre de quatre et leur poids varie de 2 026 à 1 014 livres.

La construction de ce bateau représente une dépense de plus de 130 000 livres pour qu'il soit prêt à appareiller, dont 80 000 pour la seule coque, ce à quoi on peut rajouter plus de 17 000 livres si on envisage d'installer un doublage en cuivre.

En considérant les dépenses de cargaison et d'équipage, on arrive à un investissement global de l'ordre de 400 000 livres.

Les hommes qui servent l'Aurore sont au nombre de 45, avec un état-major de 8 personnes, 6 maîtres, 15 matelots, 10 novices et 6 mousses.

Les provisions de bouche embarquées pour l'état-major sont nombreuses et raffinées, avec en plus des denrées habituelles, des vins de qualité, de l'eau de vie, des épices variées, près de 150 volailles et des moutons sur pied, etc...

Sans compter l'eau dont il a besoin, les vivres de l'équipage représentent un poids d'environ 50 tonnes, pour parvenir à une ration quotidienne de plus de 3 000 calories, alors que celle des 600 à 650 captifs n'est que de 2 000 calories pour un poids approximatif de 25 tonnes. La quantité d'eau à bord est de 140 000 litres, stockée dans près de 600 barriques de près de 250 litres chacune et qui ont un poids total à vide de presque 20 tonnes.

Les cuisines, qui sont à bâbord pour les captifs et à tribord pour l'équipage, utiliseront pratiquement 20 tonnes de bois durant un périple dont la durée dépasse souvent deux ans.

Lors de son long séjour sur le littoral africaine et pendant que le capitaine s'occupe de l'achat des futurs esclaves, les charpentiers transforment l'entrepont pour créer les parcs et installent les échafauds.

Pour le retour vers la France à partir des îles d'Amérique, l'entrepont est à nouveau aménagé pour recevoir le plus de cargaison possible.

Le nombre d'esclaves présents à Saint Domingue est estimé à plus de 500 000 en 1787, et la production de sucre de cette colonie est phénoménale.